# Comment optimiser l’Expérience Client dans un monde qui n’est pas celui des bisounours ?
Fabienne Galzin, Customer Experience leader - BVA Xsight

"Générer des expériences mémorables est clé pour fidéliser les clients !"

Fabienne Galzin
Customer Experience leader - BVA Xsight

4 Déc. 2023

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Pour Fabienne Galzin (BVA Xsight), créer un lien suffisamment fort pour fidéliser les clients — et ainsi obtenir un réel ROI — suppose un effort bien particulier de la part des marques. Celui de toucher leurs émotions et leur faire vivre des expériences positives qu’ils vont vraiment mémoriser. Ce qui n’a rien de si évident, et va bien au-delà de ce qui est le plus souvent mis en œuvre par les entreprises. Elle nous présente les recettes et les outils conçus par BVA Xsight pour aider à réussir cet exercice.

MRNews : En théorie, la qualité de l’expérience client n’est pas une fin en soi, mais un facteur clé de fidélisation. Vos interlocuteurs dans les entreprises ont-ils souvent une vision « économique » de ces enjeux ?

Fabienne Galzin (BVA Xsight) : Oui, en ce sens que la question du ROI des actions vient très haut dans leurs préoccupations. Ce n’est pas nouveau, mais le contexte dans lequel nous évoluons ne fait que renforcer ce phénomène, chaque investissement doit être économiquement justifié. La problématique n’est cependant pas si simple… Il y a d’une part en effet le sujet du lien entre la satisfaction et la fidélité effective des clients. Mais aussi celui du ROI de chacune des actions possibles. Et vient s’ajouter à cela le paramètre « temps », certains efforts ne pouvant être rentables que dans la durée et non à court terme. Les entreprises ont donc tendance à traiter ces sujets de façon pragmatique, en essayant surtout de prioriser leurs investissements. 

Je précise néanmoins que nos interlocuteurs raisonnent aujourd’hui bien souvent avec des approches de type NPS, la métrique « recommandation » étant ainsi bien plus explicitement présente que la notion de « fidélité » dans leurs briefs, même si les 2 sont intimement liées. 

Quelle est la philosophie de BVA sur ces enjeux ? Ou, dit autrement, quel est le meilleur KPI selon vous pour piloter l’Expérience Client ?

Vu de ma fenêtre, le meilleur KPI est celui qui est le plus cohérent avec la stratégie et l’ambition clé de l’entreprise. Si son enjeu numéro 1 est l’élimination des irritants (les « pain points »), il est logique pour elle de suivre d’abord et avant tout ce point précis, le pourcentage de clients mécontents étant alors un KPI adapté. Cela ne ferait pas nécessairement sens pour une marque qui viserait l’excellence. Ou pour une autre dont la stratégie reposerait sur un positionnement de type Qualité/Prix… Donc à chaque entreprise son combat et le KPI le plus en ligne avec celui-ci. 

Vu de ma fenêtre, le meilleur KPI est celui qui est le plus cohérent avec la stratégie et l’ambition clé de l’entreprise (…). Donc à chaque entreprise son combat et le KPI le plus en ligne avec celui-ci. 

Mais, in fine, l’enjeu clé le plus universel est celui de la qualité du lien avec les clients. C’est lui qui génère à la fois de la fidélité et de la recommandation. Chez BVA, vous le savez, nous sommes des passionnés des sciences comportementales. De cela découlent un certain nombre de convictions, dont celle de l’importance primordiale des émotions. Elles ont un rôle essentiel dans toutes les décisions des gens, y compris lorsqu’ils achètent un produit ou un service. Et elles sont clés également pour assurer un lien fort entre eux et les marques. Elles constituent LE grand levier à actionner pour engager les clients à moyen ou long terme, tout simplement parce que ce sont elles qui leur permettent de mémoriser leurs expériences. Ressentir des émotions positives génère en eux des souvenirs positifs, et c’est ainsi que se crée le lien et la fidélité, et même la recommandation auprès des proches. Cqfd : pour établir des liens forts avec ses clients, une marque doit donc leur faire vivre des expériences positives mémorables !

In fine, l’enjeu clé le plus universel est celui de la qualité du lien avec les clients. C’est lui qui génère à la fois de la fidélité et de la recommandation (…). Notre conviction est que les émotions constituent LE grand levier à actionner pour engager les clients à moyen ou long terme, tout simplement parce que ce sont elles qui leur permettent de mémoriser leurs expériences.

Y parviennent-elles si souvent ? 

Non en effet, ce n’est pas si simple ! Des marques peuvent très bien répondre « correctement » à vos besoins, sans que ça laisse en vous des traces mémorielles solides. L’expérience globale vous paraitra acceptable ; mais si elle est trop « lisse » comme c’est souvent le cas, elle ne vous fidélisera pas réellement ! C’est un parti pris fort en effet que d’aller plus loin pour toucher les émotions et créer ainsi des souvenirs positifs. Mais cela repose sur un background scientifique éprouvé, avec la fameuse règle du Peak End évoquée par les spécialistes de l’économie comportementale, et décrite pour la première fois par Daniel Kahneman. L’idée est que nous ne mémorisons pas tous les moments d’une expérience, mais d’abord et avant tout les moments les plus intenses, qu’ils soient positifs ou négatifs. Et encore plus s’ils interviennent à la conclusion de celle-ci. Si vous passez la journée chez Disneyland avec vos enfants, et que vous voyez la joie se lire dans leurs yeux au moment de la parade ou du feu d’artifice final, il y a de grandes chances que vous aussi viviez cela très positivement. Et vous oublierez alors le temps passé dans les files d’attente ou le fait que le hot-dog était « moyen ». Dit autrement, supprimer les pain-points ne suffit pas pour rendre une expérience mémorable ; encore faut-il créer ce genre de pics positifs dans l’expérience que vous faites vivre à vos clients. Cela se retrouve naturellement dans les chiffres, avec un delta de NPS énorme (proche de 40) entre les clients selon qu’ils ont vécu ou pas ces expériences positives mémorables.

La fameuse règle du Peak End évoquée par les spécialistes de l’économie comportementale, et décrite pour la première fois par Daniel Kahneman dit que nous ne mémorisons pas tous les moments d’une expérience, mais d’abord et avant tout les moments les plus intenses, qu’ils soient positifs ou négatifs. Et encore plus s’ils interviennent à la conclusion de celle-ci.

Comment une entreprise peut-elle agir en ce sens, et s’assurer objectivement qu’elle génère bien ce type d’expériences ?

Pour les y aider, nous avons défini une métrique essentielle, le Net Memory Score (NMS). C’est un nouvel indicateur lié au souvenir qui parle vraiment aux équipes et oriente leurs actions. Cela correspond tout simplement au solde entre la proportion des clients déclarant avoir des souvenirs marquants positifs et celle conservant des souvenirs marquants négatifs. Et nous nous appuyons sur un modèle propriétaire que nous avons dénommé EPIC. Celui-ci s’inspire des sciences comportementales et tout particulièrement du livre référence « The Power of Moments » coécrit par deux universitaires, Chip et Dan Heath. Le principe d’EPIC est de s’intéresser aux 4 grands drivers émotionnels permettant de provoquer les pics positifs que nous avons évoqués, et ainsi de générer des expériences mémorables.

Pour aider les marques, nous avons défini une métrique essentielle, le Net Memory Score (NMS), qui correspond tout simplement au solde entre la proportion des clients déclarant avoir des souvenirs marquants positifs et celle conservant des souvenirs marquants négatifs. Et nous nous appuyons sur un modèle propriétaire que nous avons dénommé EPIC. Celui-ci s’inspire des sciences comportementales et tout particulièrement du livre référence « The Power of Moments » coécrit par deux universitaires, Chip et Dan Heath.

EPIC, c’est aussi un clin d’œil aux épices en cuisine, l’idée étant de bien utiliser et doser, pour relever les expériences, les 4 ingrédients que résume l’acronyme. E, c’est l’Elévation. C’est le fait de surprendre positivement les clients, en allant donc au-delà de leurs attentes. P signifie ‘Pride’, on fait en sorte que le client se sente valorisé et même unique. Vient ensuite le I pour ‘Insight’, lorsque les clients découvrent quelque chose de nouveau, ont une révélation, par exemple sur eux-mêmes, ou la marque. C’est ce que j’ai ressenti quand je suis parvenue à réparer ma machine à laver en écoutant les instructions du technicien Darty au téléphone. Pour moi, cela a été une expérience inoubliable avec de l’Insight et du Pride d’ailleurs ! (rires). En enfin nous avons le C pour ‘Connection’, un moment où on se sent en lien avec les autres – en mode ‘one to one’ ou bien au sein d’une communauté par une vision commune. Cela peut passer par le rire, par exemple lorsque le steward de votre compagnie aérienne fait un show humoristique pour vous indiquer les consignes de sécurité à respecter, vous vivez un moment de connexion.

C’est en combinant ces 4 ingrédients qu’une marque peut créer des souvenirs positifs chez ses clients…

Tout à fait. En même temps il est aussi fondamental de valider que le contrat relationnel de base attendu par les clients est au rendez-vous. Pour cela nous avons identifié chez BVA à partir des attentes clients fondamentales les 4 éléments clés qui, ensemble, permettent de délivrer les basiques. C’est notre modèle FREE. La marque se doit d’être « Fair », au sens de faire preuve d’équité et d’honnêteté, « Reliable », fiable. Elle doit en outre donner aux clients le choix de décider, avec des services ou options adaptées à ses besoins,ce qui correspond au E de « Empower » ; et enfin faciliter la relation, qui doit être la plus « Easy » possible. 

Il est aussi fondamental de valider que le contrat relationnel de base attendu par les clients est au rendez-vous. Pour cela nous avons identifié chez BVA à partir des attentes clients fondamentales les 4 éléments clés qui, ensemble, permettent de délivrer les basiques. C’est notre modèle FREE.

Comment intégrer ces approches et ces « modèles » » lorsqu’on dispose déjà d’outils, des baromètres de type NPS notamment. On casse tout pour mieux reconstruire ? 

C’est une bonne question… Non il ne faut surtout pas tout casser ! Et certainement pas le NPS. Celui-ci a ses limites, il oblige à piloter un solde ce qui n’a rien d’évident. Mais il offre aussi d’énormes avantages, dont celui d’être massivement diffusé ce qui donne de puissantes possibilités de benchmark. On peut par ailleurs l’utiliser de façon relativement souple, la question de base étant celle des intentions de recommandation ce qui fait le plus souvent parfaitement sens. L’idée est bien que l’approche EPIC&FREE et la mesure des souvenirs que nous avons évoquées s’adaptent à l’existant et viennent compléter les études relationnelles sous forme de modules. Elles s’intègrent donc très simplement et apportent un cadre et un nouveau regard très opérationnel pour définir ou ajuster sa stratégie CX. Les questions FREE existent généralement comme le Reliable ou le Easy (cf le customer effort score) et il nous arrive bien sûr de revoir leurs libellés.

Il ne faut surtout pas tout casser ! Et certainement pas le NPS. Celui-ci a ses limites, il oblige à piloter un solde ce qui n’a rien d’évident. Mais il offre aussi d’énormes avantages, dont celui d’être massivement diffusé ce qui donne de puissantes possibilités de benchmark.

Vous l’avez évoqué, les entreprises doivent rationaliser leurs actions, ne pas engager des efforts trop couteux à mettre en œuvre au regard des retombées économiques. Pouvez-vous les aider sur ce point ? Comment ?

Cette question peut être abordée avec des modèles statistiques. Nos data scientists ont tout le savoir-faire nécessaire pour travailler avec nos clients dans cette direction. Cela suppose néanmoins d’utiliser beaucoup de données internes aux entreprises, avec de possibles limites pour ce qui est de leur disponibilité. Nous devons donc aussi être capables de travailler avec nos interlocuteurs de façon pragmatique. D’abord en les aidant à formuler une stratégie globale avec des priorités d’action clairement tranchées, notamment en termes de moments clés et de drivers émotionnels à prioriser. C’est précisément la vocation des outils que nous venons d’évoquer — la nouvelle approche XPASS — que d’y contribuer.

Mais notre accompagnement sur ces sujets va au-delà. Une fois les priorités établies, il faut repenser et redéfinir le design de l’Expérience Client en pensant pics émotionnels et ROI, ce que nous faisons avec notre Expérience Factory. Et ensuite monitorer la performance, que ce soit avec des dispositifs de feedback management et de Mystery Shopping, BVA étant un spécialiste de ces sujets. Travailler sur la culture client est aussi un incontournable car c’est le ciment de tout ce qu’on fait, pour embarquer tout le monde, et pour pérenniser les initiatives mises en place. C’est ce que nous proposons avec notre nouvelle approche MindXset. J’ajoute que travailler efficacement ces sujets exige parfois des démarches de transformation profondes du côté des entreprises. Ce sont là encore des enjeux sur lesquels nous sommes présents en nous appuyant sur les principes du Nudge.

Travailler efficacement ces sujets exige parfois des démarches de transformation profondes du côté des entreprises. Ce sont là encore des enjeux sur lesquels nous sommes présents en nous appuyant sur les principes du Nudge.

Voyez-vous enfin un dernier conseil à donner aux équipes des entreprises sur ces sujets ?

Je pense que l’on n’insiste jamais assez sur l’importance de la Culture Client dans les entreprises. Car il ne peut y avoir un Retour sur Investissement satisfaisant sans un réel engagement de la part des équipes. Il est important, et les entreprises le savent, de travailler la symétrie des attentions, en donnant du sens aux équipes, et en leur donnant les moyens de délivrer une CX mémorable. Et l’action visant à optimiser l’Expérience ne doit pas être un soufflet qui retombe aussi vite qu’il est monté. Cela nécessite souvent de mettre en œuvre de vrais chantiers de transformation pour travailler dans la durée, en se donnant ainsi les meilleures conditions de réussite possible. 


 POUR ACTION 

• Echanger avec l’ interviewé(e) : @ Fabienne Galzin

  • Retrouver les points de vue des autres intervenants du dossier 

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