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« Les communautés d’études n’ont pas fini de faire bouger les lignes pour les market researchers » – Interview de Béatrice Maccario (Krealinks)

21 Oct. 2025

Interview de Béatrice Maccario (Krealinks)

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Progressivement mais sûrement, les communautés à des fins d’études se sont imposées dans la boîte à outils des équipes Insights. Elles constituent même l’une des évolutions méthodologiques majeures de ces dix ou quinze dernières années. Mais ces dispositifs sont-ils réellement arrivés à maturité, ou bien continuent-ils à se transformer en profondeur — sous l’effet des nouveaux besoins des entreprises et des avancées technologiques ?
Béatrice Maccario, Deputy CEO et co-fondatrice de Krealinks, partage sa vision et revient sur les choix structurants opérés par sa société pour accompagner cette évolution.

Béatrice Maccario (Krealinks) : Vu de loin, on pourrait croire en effet que les communautés sont désormais une affaire qui roule. En réalité, elles sont en pleine mutation. Les attentes des entreprises ont beaucoup évolué : elles veulent non seulement écouter leurs consommateurs, mais aussi être capables d’agir plus vite. Cette aspiration est une donnée très structurante. Pour bien y répondre, cela suppose des plateformes plus robustes, plus évolutives, et capables d’intégrer l’IA, la personnalisation et même une vision claire de leur roadmap technique.
Les besoins sous-jacents vont bien au-delà de la simple écoute : il s’agit pour les annonceurs de s’approprier réellement leurs communautés, de les faire vivre en interne comme un dispositif continu, capable d’apporter des réponses à une grande variété de problématiques. Cela peut prendre la forme de petits tests rapides, d’explorations plus profondes, d’espaces de co-création… mais aussi de véritables terrains d’expérimentation, où l’on teste, ajuste et apprend en direct avec les consommateurs. Les communautés deviennent ainsi un outil souple et vivant, intégré au quotidien des équipes.

Les attentes des entreprises ont beaucoup évolué : elles veulent non seulement écouter leurs consommateurs, mais aussi être capables d’agir plus vite.

Lire aussi > Communautés et études marketing #1 : le cas Generali & Moi – Interview de Delphine Gras (Generali France) et Béatrice Maccario (Krealinks)

Quels sont les 2 ou 3 cas d’usage qui tirent le plus la demande aujourd’hui ?

Il y a aujourd’hui un besoin manifeste des entreprises de centraliser les études qualitatives et quantitatives dans un même dispositif, pour gagner en cohérence et efficacité. C’est une des aspirations dominantes de nos interlocuteurs, de même que celle d’avoir un accès direct au consommateur, sans intermédiaire, et de pouvoir l’écouter dans la durée. Une autre application importante des communautés consiste à les utiliser comme un laboratoire de co-création et d’innovation. Nous voyons de plus en plus d’entreprises aller dans cette direction.

Mais, en réalité, les cas d’usage sont très variés… Nous en avons identifié un total de 6, qui sont résumés dans ce document (voir ci-dessous). Cela montre bien que les communautés ne sont plus seulement un outil d’étude, mais un véritable levier stratégique pour les entreprises.

Il y a aujourd’hui un besoin manifeste des entreprises de centraliser les études qualitatives et quantitatives dans un même dispositif, pour gagner en cohérence et efficacité. C’est une des aspirations dominantes de nos interlocuteurs, de même que celle d’avoir un accès direct au consommateur, sans intermédiaire, et de pouvoir l’écouter dans la durée.

Les besoins évoluent, vous l’avez évoqué. Mais quid de l’outil lui-même ? Est-il parvenu à maturité, ou bien encore en mutation ?

L’outil est mature sur ses fondations — la capacité à fédérer et animer des communautés. Mais il est clairement encore en mutation, et sur plusieurs axes. D’abord celui de la qualité de la plateforme. Celle-ci se doit d’être de plus en plus évolutive, robuste, personnalisable, à même d’intégrer l’IA… De fait, les marques scrutent désormais tout, jusqu’à la roadmap technique.

Un second axe important, qui se combine avec le premier, est celui de la richesse fonctionnelle : il est essentiel de proposer, à l’intérieur même de la plateforme, des solutions pointues permettant de conduire aussi bien des études qualitatives approfondies que des sondages sophistiqués. Et plus largement, de mettre à disposition un vaste choix d’activités : cela permet non seulement de varier les modes de recueil pour mieux servir les objectifs d’études, mais aussi d’optimiser l’engagement des membres, qui ont besoin de diversité pour rester actifs et motivés.

L’outil devient de plus en plus une sorte de « couteau suisse » ?

On peut dire ça, le fait est qu’il devient de plus en plus multi-tâches. J’ajouterai que l’outil doit évoluer pour répondre à une forte attente d’autonomie des entreprises. Hier, le full service dominait. Aujourd’hui, celles-ci veulent piloter elles-mêmes leurs études quali et quanti. Ce qui n’exclut pas du tout qu’elles s’appuient ensuite sur des experts pour des besoins très ciblés — comme la gamification, l’animation ou la gestion de projets complexes. Un dernier point important porte sur l’intégration des données. Les marques regardent aussi comment leur communauté peut s’intégrer plus largement à leur propre écosystème de datas, afin de s’assurer d’un fonctionnement en synergie et de maximiser la valeur produite. Nous travaillons aussi en partenariat avec les instituts d’études, qui prennent en charge la partie services et accompagnement, afin de permettre aux communautés de déployer tout leur potentiel.

Hier, le full service dominait. Aujourd’hui, les entreprises veulent piloter elles-mêmes leurs études quali et quanti. Ce qui n’exclut pas du tout qu’elles s’appuient ensuite sur des experts pour des besoins très ciblés — comme la gamification, l’animation ou la gestion de projets complexes.

On pourrait dire qu’aujourd’hui, les communautés reposent sur deux exigences complémentaires : la robustesse, parce qu’elles s’installent dans la durée et que les annonceurs s’engagent sur plusieurs années ; et l’agilité, à la fois dans les outils et dans les services, pour laisser au client la liberté de piloter seul ou d’être accompagné selon ses besoins. C’est précisément pour répondre à cet ensemble d’exigences, qui se généralise côté annonceurs, que nous avons construit un partenariat stratégique et technique avec Qualtrics. Il nous permet de combiner la profondeur des communautés Krealinks avec la puissance d’une plateforme de référence mondiale, et ainsi d’apporter une réponse robuste, évolutive et intégrée.

Le partenariat stratégique et technique que nous avons construit avec Qualtrics nous permet de combiner la profondeur des communautés Krealinks avec la puissance d’une plateforme de référence mondiale, et ainsi d’apporter une réponse robuste, évolutive et intégrée.

Quel est l’impact de l’Intelligence Artificielle sur ces outils ?

L’IA change la donne de façon très concrète. Nous avons par exemple lancé récemment le rapport quali automatisé, qui rend possible l’analyse instantanée d’une masse considérable de contenus. Il permet à la fois des analyses globales et des zooms ciblés, tout en conservant la profondeur du quali et en mettant en avant les verbatims clés.
Venant moi-même du quali, il était essentiel pour moi de proposer un type de rapport et d’analyse à la hauteur des exigences des qualitativistes. C’est un point important à souligner : nous ne sommes pas des pure-players de la Tech. Nous nous appuyons sur une très solide expérience des études, ce qui nous aide à discerner le meilleur usage possible de ces nouveaux outils, dont l’Intelligence Artificielle.

Nous ne sommes pas des pure-players de la Tech. Nous nous appuyons sur une très solide expérience des études, ce qui nous aide à discerner le meilleur usage possible de ces nouveaux outils, dont l’Intelligence Artificielle.

Nous travaillons également sur la modération assistée par IA, pour faciliter l’animation des communautés et faire gagner un temps précieux à nos clients.
Tous ces progrès montrent que l’IA n’a pas vocation à remplacer l’humain, mais à renforcer sa capacité d’analyse et d’action : elle permet de révéler l’intelligence collective et de la rendre plus directement exploitable.

Nous avons fait le choix d’une plateforme ouverte, évolutive et centrée sur l’humain. L’ouverture est indispensable de notre point de vue, pour permettre à nos clients de croiser leurs insights communautaires avec d’autres données (CRM, quanti, réseaux sociaux). Mais nous sommes aussi convaincus de l’impératif d’évolutivité, avec une roadmap technologique claire et une intégration continue de l’IA. J’ajoute et j’insiste néanmoins sur cette composante Humaine, car la valeur ultime reste la capacité à comprendre les émotions et à transformer l’écoute en décisions concrètes. C’est dans cet esprit que nous travaillons actuellement sur la modération assistée par IA, conçue pour libérer du temps aux animateurs et community managers et leur permettre de se concentrer sur ce qui compte vraiment : la qualité de l’échange et la proximité avec les participants.

La valeur ultime reste la capacité à comprendre les émotions et à transformer l’écoute en décisions concrètes.

Voyez-vous enfin des conseils qui vous sembleraient importants, en particulier auprès des annonceurs, pour les aider à tirer le meilleur parti de ces outils ? Ou bien des pièges à éviter ?

Mon premier conseil, c’est de penser la communauté comme une relation vivante, pas seulement comme une technologie. Plus on soigne l’expérience des membres, plus les retours sont sincères et riches.
Le deuxième est de clarifier les objectifs avant de lancer une communauté. Cela évite de se retrouver avec beaucoup de données… mais peu de réponses utiles.
Enfin, le piège à éviter, c’est de croire qu’une communauté fonctionne en silo. Sa vraie puissance vient de sa capacité à s’intégrer dans un dispositif global d’écoute, pour faire le lien entre signaux faibles, émotions et données chiffrées, et ainsi passer plus vite de l’écoute à l’action.


 POUR ACTION 

• Echanger avec l’interviewé(e) : @ Béatrice Maccario

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