Réussir son packaging : les règles

Les 5 règles d’or pour réussir son packaging – Interview de Sandrine Pouré, Scènes de Vie

9 Nov. 2022

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Réussir son packaging exige de respecter scrupuleusement quelques règles essentielles et intangibles, que la recherche de l’originalité peut faire perdre de vue. Mais encore faut-il aussi être attentif aux tendances les plus prégnantes du moment et à la façon dont les comportements des consommateurs évoluent. Toute la difficulté est ainsi de composer une juste alchimie faisant primer l’efficacité. Sandrine Pouré, co-fondatrice avec Frédéric Mariani de Scènes de Vie, un institut spécialiste de ces enjeux, nous livre sa vision de ces règles d’or à suivre.

MRNews : Votre société est spécialisée dans les problématiques des produits de grande consommation et en particulier les tests de packaging, où vous intervenez en mode « ad’hoc ». Des enseignements transversaux se dégagent-ils néanmoins quant aux critères de réussite d’un packaging ?

Sandrine Pouré (Scènes de Vie) : Oui, tout à fait. Nous le voyons au travers de l’historique de 15 ans d’études dont nous disposons, précisément menées sur cette question de comment construire un packaging performant dans un environnement de type Grande Consommation. Nos clients annonceurs nous sollicitent avec des interrogations spécifiques à leurs enjeux, mais des règles transverses émergent clairement. Entre spécialistes du marketing, on peut passer des heures à analyser un packaging, mais lorsqu’il fait ses courses dans un supermarché, le consommateur fait ses choix en une fraction de seconde ! Il est guidé par des automatismes, et par tout un apprentissage élaboré au travers de ses précédents achats. L’usage d’un outil comme le Tachistoscope, dont le principe est de montrer le packaging très rapidement afin de voir les informations principales qui émergent et leur hiérarchie, est notamment très riche d’enseignements. 

« Entre spécialistes du marketing, on peut passer des heures à analyser un packaging, mais lorsqu’il fait ses courses dans un supermarché, le consommateur fait ses choix en une fraction de seconde ! »

Sandrine Pouré (Scènes de Vie)

S’il fallait synthétiser en quelques points les règles d’or pour réussir son packaging, lesquelles citeriez-vous ?

J’en vois 5, qui me semblent se détacher dans l’univers de la grande consommation. Elles correspondent en fait aux 5 composantes essentielles d’un packaging. 

La première concerne la marque. Elle doit être le premier élément lu dans un décor, tout particulièrement lorsqu’elle est relativement nouvelle sur son marché. Il faut veiller à utiliser une typographie extrêmement claire, lisible. Et donc à l’effet de contraste avec les autres couleurs du décor. Nous voyons parfois des propositions peu efficientes, avec l’usage de couleurs ton sur ton. Cela peut être séduisant hors contexte. Mais, en rayon, cela ne fonctionne pas ! Voilà deux exemples qui, à contrario, nous semblent efficaces, avec Lustucru et Gerlinéa.

De même, nous ne recommandons pas l’usage d’une écriture verticale, qui demande un effort et ne favorise donc pas la lecture dans un laps de temps extrêmement court.

La seconde règle concerne plus spécifiquement la couleur elle-même. Comment la résumeriez-vous ?

Il faut accorder une attention très particulière à la couleur principale, que ce soit celle du produit lui-même ou bien du décor selon les cas. C’est une évidence, mais on l’oublie parfois, le produit se présente aux yeux des consommateurs dans l’environnement d’un rayon. Un piège dans lequel peut tomber la marque est d’adopter une couleur trop déconnectée de celles qui dominent dans le rayon en question. Certes, on peut penser que le contraste optimise la « saillance » du produit, qu’il attire l’oeil sur lui. Mais le risque est que les consommateurs évacuent inconsciemment celui-ci de leur périmètre de recherche. Un cas très emblématique de ce risque est celui du ketchup Heinz.

La marque avait proposé un ketchup de couleur verte, précisément pour se distinguer du rouge ultra-dominant au sein du rayon. Mais celui-ci a été largement délaissé par les consommateurs, tout simplement parce qu’ils ne l’assimilaient pas à du ketchup… S’il n’est pas rouge, c’est qu’il doit être là par erreur ! Les équipes de Heinz ont donc vite fait machine arrière, et compris qu’il s’agissait d’une fausse bonne idée ! 

Un packaging, c’est une marque, une couleur dominante parfois deux. Mais c’est également un visuel. Quelles règles faut-il respecter pour celui-ci ?

Les représentations des produits ou des ingrédients constituent un élément essentiel. Elles permettent de capter l’oeil, mais aussi de véhiculer la sensorialité du produit, éventuellement sa gourmandise si on est dans l’univers alimentaire. Cela peut donc avoir un impact déterminant sur son attractivité. De nombreuses études nous l’ont montré, la rénovation du visuel de ce produit Tahiti Douche étant un bel exemple. Dans ce type d’exercice, il importe toujours de veiller au juste équilibre, l’impact du visuel ne devant surtout pas se faire au détriment de la clarté de la proposition.

Vous incluez les mentions dans les composantes fondamentales d’un packaging. Celles-ci sont-elles vraiment lues par les shoppers ?

Elles sont importantes. Mais il faut définir leur place dans le décor en fonction des clés d’entrée propres à la catégorie. Qu’est-ce que les consommateurs ont besoin de savoir en priorité lorsqu’ils achètent un produit de ce type ? Les réponses sont extrêmement diverses. Dans certains cas, l’alimentaire par exemple, l’indication de la variété, du parfum ou de la recette peut primer. Dans le domaine Droguerie-Parfumerie-Hygiène, la clé principale va plutôt être la destination du produit (le type de cheveux, de peau…), ou l’action associée à celui-ci (nourrissante, hydratante…). Ou bien encore la composition, le pourcentage de matière grasse, le taux réduit en sel, l’absence de paraben… Les indications basiques comme la durée de cuisson ou le nombre de personnes pour un plat sont importantes, mais elles ne doivent pour autant pas prendre trop de place sur le décor, sauf si elles expriment un avantage spécifique. Les mentions de type « bénéfices » peuvent aussi avoir de l’impact, là encore selon les catégories. Mine de rien, signaler sur un camembert qu’il est « Savoureux et Crémeux », ou que des steaks hachés ont un « Moelleux incomparable », cela peut jouer sur l’attractivité des produits dans le contexte d’achats extrêmement rapides.

Un packaging est un support pour exprimer différents signes. Mais il est aussi un objet en lui-même. Cette composante compte-t-elle beaucoup ?

Oui. Mais, là encore, la réponse varie fortement selon les catégories. Dans certains cas, les bénéfices qu’il est susceptible d’apporter en termes de praticité, d’ergonomie ou de conservation peuvent être décisifs. Voici des exemples qui nous semblent bien l’illustrer, dont celui du flacon-pompe du lait Mixa Intensif et des Knacki Ball d’Herta :

Les règles que vous venez d’évoquer sont intangibles. Ne faut-il pas aussi intégrer des tendances plus récentes, et plus ou moins durables ? 

Oui, tout à fait. La conscience des enjeux climatiques et environnementaux fait partie de ces tendances clés. Elle s’est fortement exacerbée ces dernières années, et les impacts sont manifestes, en premier lieu sur le packaging lui-même. Les consommateurs expriment le souhait que les sur-emballages disparaissent, et de voir se développer l’usage des matériaux recyclables. Mais les industriels doivent cependant être vigilants. Si l’abandon du plastique au profit du carton ou du papier est apprécié, nos tests mettent parfois en évidence des incidences négatives sur les ventes, du fait notamment d’une moindre praticité ou de problèmes de conservation. Il faut donc bien anticiper sur les comportements effectifs des shoppers.

Voir aussi > Le prochain évènement organisé par Scènes de Vie sur le thème « ‘Comment anticiper votre positionnement prix face à l’inflation ? » (Jeudi 24 Novembre 2022, de 12h15 à 15h, à Paris)

Ces mêmes enjeux ont aussi un effet sur l’importance des mentions. Les consommateurs ont un fort besoin de réassurance quant à la qualité et à la provenance des produits. Signifier qu’il s’agit d’une production locale, du type Fabriqué en France, est souvent très positif. A contrario, signaler qu’un flacon est réalisé en plastique recyclé a bien moins d’impact direct sur l’achat…

Nous observons par ailleurs un engouement pour les produits mettant en avant les efforts effectués, dans l’alimentaire, pour bien rémunérer les agriculteurs et les éleveurs. Ou bien les bonnes conditions d’élevage animal. Dans le domaine de l’hygiène-beauté, mentionner que les produits n’ont pas été testés sur les animaux est aussi un facteur favorable, à la fois pour des considérations d’image comme pour les ventes.


 POUR ACTION 

• Echanger avec l’interviewé : @ Sandrine Pouré

• S’inscrire au prochain événement organisé par Scènes de Vie : « ‘Comment anticiper votre positionnement prix face à l’inflation ? » (Jeudi 24 Novembre 2022, de 12h15 à 15h, à Paris)

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