Voilà ce qui s’appelle un match à gros enjeu ! Autour des préférences que les mamans ont vis-à-vis des marques, c’est en effet une sacrée bataille qui se livre, avec un marché consolidé pesant plusieurs milliards d’euros, et des règles du jeu bien particulières !
En ce grand mois de rentrée, IDM Families nous dévoile les résultats de l’édition 2019 de son baromètre dédié aux préférences des mamans sur ces quatre univers majeurs que sont les Jeux et Jouets, le Textile, l’Alimentation et l’Hygiène-Soin. Patricia Gelin, directrice générale d’IDM Families, nous présente et nous en commente les principaux enseignements.
MRNews : Vous venez de ré-éditer votre baromètre sur les marques préférées des mamans. Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots la méthodologie mise en oeuvre ?
Patricia Gelin (IDM Families) : Nous sommes restées fidèles à la méthodologie que nous utilisons depuis la première édition de notre baromètre. L’étude est réalisée sur internet, auprès d’un échantillon de plus de 500 personnes et représentatif des mères d’enfants âgés de 3 à 11 ans. Pour ces quatre univers majeurs que sont les Jeux et Jouets, le Textile, l’Alimentation et enfin l’Hygiène-Soin, nous leur posons une même question : « Quelles sont vos marques préférées (dans l’univers…) destiné à l’enfant ? ». Nous présentons ici le top5 des marques préférées spontanément citées pour chacun de ces 4 secteurs, sur un total de marques citées qui varie d’une centaine (pour l’hygiène-soin) à plus de 200 (pour l’alimentation).
Les résultats sont disponibles sur ce lien et il nous est bien sûr possible de communiquer un classement plus complet.
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Commençons-donc par l’univers du jeu et des jouets… Quelles sont donc les marques préférées des mamans ? Et le podium 2019 ressemble-t-il à celui de 2018 ?
Comme l’an dernier, deux marques se partagent la première marche du podium : Lego et Playmobil. Elles émergent à égalité et ce très nettement, avec une performance assez extraordinaire puisqu’elles totalisent chacune 40% des préférences spontanées
Il s’agit de deux marques anciennes. Elles bénéficient à l’évidence d’une prime correspondant au capital de confiance qui est le leur du fait de leur longévité. Mais ce sont aussi deux marques qui ont renouvelé l’expérience client. Elles savent conserver leurs bases tout en apportant des composantes qui revisitent la façon de jouer, avec des applications, de l’interactivité, des films qui ne sont pas pensés que pour les enfants. Il y a donc un vrai travail de l’offre qui permet de s’adresser à la fois aux enfants et aux parents. Et elles savent également proposer une expérience commune à toute la famille, et répondre avec beaucoup de pertinence au besoin d’avoir des moments de plaisir partagés.
On note par ailleurs l’arrivée dans le top5 de deux marques, Nintendo et Barbie, cette dernière ayant très habilement renouvelé son univers avec une image des femmes plus en phase avec les représentations d’aujourd’hui. Nintendo s’est quant à elle distinguée sur le terrain des offres, avec le lancement de la Switch, qui correspond à une nouvelle expérience de jeu, ne nécessitant pas d’utiliser un écran de télévision.
Le match est-il aussi déséquilibré dans le domaine alimentaire ?
Absolument pas. Les positions sont au contraire beaucoup plus étales. Et, comme en 2018, ce sont les marques de distributeurs qui s’installent à la première marche.
On retrouve dans le top5 les grandes marques historiques de cet univers, telles que Lu, Nestlé et Danone , ces deux dernières reculant néanmoins d’une place. Kinder y fait son apparition, alors que Lactalis n’y est pas cette année. Beaucoup d’indices traduisent la crise de confiance qui frappe l’alimentaire, et le fait que les rentes de situation n’existent plus. Je pense en particulier à cette solide présence des MDD, qui forment naturellement un ensemble quelque peu hétérogène, mais avec le dénominateur commun d’un bon rapport qualité / prix. Ce sont aussi des marques qui ont fortement intégré la composante bio, comme Auchan Bio ou Carrefour Bio par exemple, répondant ainsi à un besoin des mamans de bénéficier de la rassurance que véhicule encore ce label, sans que cela ne grève de trop le porte-monnaie. Le pourcentage élevé de non-réponse traduit très directement une certaine difficulté des marques au global à satisfaire les attentes des familles…
Comment interprétez-vous l’arrivée de Kinder dans le top 5 ?
Dans un contexte où il y a beaucoup d’anxiété, il est vraisemblable que Kinder apporte une touche bienvenue de plaisir, et réponde au besoin des familles d’avoir des petites parenthèses de plaisir partagé, en échappant au diktat de la discipline alimentaire qu’elles sont souvent enjointes à suivre. Le goûter est un moment privilégié pour cela, avec une influence de l’enfant qui est plus importante que pour les autres repas.
Une marque se distingue-t-elle dans l’univers de l’hygiène-soin ?
Oui. C’est le cas de Cadum. Elle conserve sa première place de l’an dernier, mais avec un avantage plus net vis-à-vis de ses concurrentes et en particulier de Mustela, dont la part de préférence s’est érodée. Nivéa reste dans le top 5, mais enregistre également une baisse significative.
Le parallèle me semble assez flagrant avec l’univers de l’alimentaire. Nous avons là aussi affaire à une certaine défiance de la part des familles, avec des préoccupations sur les enjeux de santé qui ne sont pas suffisamment satisfaites. Elle se traduit par des pertes de position de certains acteurs avec, en parallèle, l’apparition de nombreuses marques plus confidentielles, là encore avec des positionnements sur le territoire du bio et du ‘naturel’, dont les offres raisonnent bien auprès des mamans.
Et enfin pour l’univers du Textile, qui occupe une part très conséquente des achats des mamans, quelles marques bénéficient de la plus forte préférence, et quelles sont les évolutions les plus notables ?
Une marque se distingue très nettement : Kiabi, avec 36% des préférences, ce qui est réellement énorme compte tenu du mode d’interrogation adopté et du nombre de marques présentes dans cet univers. Décathlon confirme sa place sur le podium. Orchestra y reste, mais en perdant quelques points. Et Adidas entre dans le top 5 avec une belle progression par rapport à l’an dernier (+ 6 points).
Quels ingrédients expliquent selon vous l’excellente performance de Kiabi ?
Nous avons affaire à un univers où les attentes sont complexes, parce qu’il faut satisfaire à la fois des parents et des enfants qui n’ont pas les mêmes critères de jugement. Et qui ont fortement évolué en l’espace de peu de temps. La prime de préférence dont bénéficiaient des marques plutôt Premium s’est considérablement amoindrie au profit de nouveaux acteurs dont le cas Kiabi est emblématique : des prix doux, associés à des produits jugés « fashion». Le rapport qualité / prix perçu est ainsi tout à fait remarquable. Même si l’on est dans un autre registre, Décathlon s’inscrit dans cette logique, avec des prix parfois spectaculairement bas tandis que l’offre est déclinée et spécialisée pour les différents sports que pratiquent les enfants, en respectant bien les attentes techniques qui leur sont associées. Il y a aussi un certain engouement pour les marques de l’univers du sport qui parviennent néanmoins à jouer la carte « fashion », ce qui est le cas d’Adidas.
Au global — tous secteurs confondus — quelles tendances vous semblent particulièrement marquantes ? Que doivent faire les marques pour être préférées des mamans ?
La valeur transactionnelle des marques compte beaucoup : les mamans doivent avoir le sentiment que les marques les aident et minimisent l’effort financier que constituent les achats effectués pour les enfants. Et on voit bien la performance des acteurs qui répondent à cette attente. Mais la préférence repose aussi énormément sur la qualité du lien affectif que les marques tissent avec les mamans. Il y a une réelle prime pour celles qui sont porteuses de sens et parviennent à être vecteur d’expériences qui connectent l’ensemble des membres de la famille, et établissent des ponts originaux. C’est évident dans l’univers des jeux et jouets, mais cela s’applique dans d’autres domaines où une connivence intergénérationnelle est possible. On pourrait imaginer, au vu de certains résultats, que l’attrait du « vintage » contribue fortement à la préférence. Ce n’est pas mon analyse. Et je pense qu’il y a de moins en moins de rentes de situation sur ces marchés. Mais les marques anciennes ont néanmoins d’excellentes cartes à jouer, avec un capital de confiance qui peut être décuplé s’il se conjugue à un renouvellement des expériences proposées aux enfants et aux familles.
POUR ACTION
• Echanger avec l’interviewée : @ Patricia Gelin