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De nouveaux « gourous » pour les études marketing #2 ? Daniel Kahneman, prix nobel d’économie.

7 Juin. 2013

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Parmi les personnalités qui auront toutes les chances d’influencer le futur de la pensée et de la recherche marketing, nous avions mis en exergue il y a peu Dan Ariely, qui compte parmi les représentants les plus emblématiques de l’école de l’économie comportementale. Une seconde figure majeure, que nous nous proposons d’évoquer ici est celle de Daniel Kahneman.

Prix Nobel d’Economie (« sans jamais avoir jamais suivi le moindre cours d’économie », dit-il), considéré par certains comme un des fondateurs de cette « économie comportementale », Daniel Kahneman est a priori assez éloigné des sphères du marketing et des études…

Et pourtant, ses travaux devraient vraisemblablement avoir une influence non négligeable sur la façon de mener les études marketing, la grande préoccupation de Daniel Kahneman n’étant ni plus ni moins que d’essayer de comprendre un peu mieux pourquoi et comment les êtres humains prennent des décisions et effectuent des choix.

Non à l’homo-economicus

Il n’est guère de grande théorie qui, d’une manière ou d’une autre, ne vienne en contredire une autre. En l’occurrence, le grand « adversaire » théorique de Kahneman et plus largement de l’économie comportementale est la théorie de l’homo-economicus, qui postule que le principe de l’être humain est de se comporter de façon rationnelle, et d’effectuer des choix qui maximisent ses intérêts au sens large du terme.

Système 1 – Système 2

Au travers de son dernier ouvrage, Système 1, Système 2, les deux vitesses de la pensée, (en VO « Thinking, Fast and Slow), Daniel Kahneman formule une vision alternative, l’idée maitresse étant que notre cerveau, au moment où il doit prendre une décision, mobilise potentiellement deux systèmes différents :

– le système 1, qui est celui de l’intuition. Pour reprendre les termes de Kahneman, « il est automatique, procède par associations, cherche les relations de cause à effet et ne s’appuie que sur le particulier. Il n’a aucun atome crochu avec les statistiques ou les grands ensembles. Ce qu’il veut, ce sont des histoires, il cherche la cohérence »

– le système 2 est celui de la capacité de raisonner, de résister aux suggestions du Système 1, de ralentir les choses, de faire preuve d’analyse logique et de livrer nos illusions de validité à une autocritique.

Mais une précision importe pour bien saisir les incidences associées à ce double système : le fait est que notre système 2 est « paresseux », dixit Kahneman là-encore. Son plein fonctionnement demande effort et concentration, et il n’intervient donc que contraint et forcé, ou bien alors il ne fait que valider paresseusement les scénario provenant du système 1. Les facteurs de contexte et de temps vont donc être déterminants pour définir l’importance relative de notre intuition et de notre raison dans nos décisions.

Une large partie de nos études marketing se font (encore) avec les postulats de l’homo-economicus

« Sowhat » diront certains… D’autres encore estimeront sans doute qu’il n’y a là rien de bien neuf, chaque jour qui passe ne faisant que démontrer un peu plus l’irrationalité de bien des décisions humaines. Certes. Mais pour en revenir aux études marketing, il est pourtant assez patent que la grande majorité d’entre elles sont conçues…et exploitées comme si la rationalité l’emportait systématiquement dans nos décisions. Du moins pour les études quantitatives, les études qualitatives ayant-elles le plus souvent vocation à décrypter le sens profond des motivations des consommateurs, au-delà de la surface des discours et des apparences. En d’autres termes, on retrouve bien là la critique de plus en plus adressée à certaines études, celle de s’intéresser à outrance au « déclaratif » d’un consommateur « mensonger ».

Comment les études marketing peuvent-elles mieux tenir compte des apports de l’économie comportementale ?

Sans doute le premier réflexe qu’imposent les découvertes associées à Daniel Kahneman et à l’économie comportementale est celui d’une meilleure prise en compte de la notion de contexte. Compte tenu de la problématique étudiée, quel est le contexte dans lequel le consommateur (ou le citoyen) va devoir prendre une décision ? Ce contexte va-t-il être favorable à ce que son système 2 s’active pleinement (typiquement une décision à fort enjeu se prenant dans la durée), ou bien l’intuition a-t-elle au contraire le plus de chance de l’emporter ?

Les protocoles d’études à utiliser doivent naturellement être choisis en fonction de ce contexte, avec la nécessité donc de cerner la part intuitive et inconsciente des décisions du consommateur. Cela s’applique avec une pertinence renforcée dans certains univers comme ceux de la grande consommation (décisions rapides et à faible enjeu)

Une palette croissante d’approches quantitatives ont pour vocation de tenir compte de cette part inconsciente de nos décisions (cf notre double dossier sur la détection des meilleures pistes d’innovation : volet 1 et 2). Elle inclue naturellement toutes les techniques éprouvées reposant sur l’observation et la mesure des comportements des consommateurs dans des contextes d’études au plus proches de « la vraie vie ». Et sans aller nécessairement jusqu’aux procédés les plus emblématiques des neurosciences (IRM,…), elle inclue donc de nouveaux protocoles spécifiquement conçus pour mesurer l’impact émotionnel des stimulus proposés aux consommateurs (concepts, produits,…)

Pour aller plus loin

Pour aller plus avant dans la connaissance des travaux de Dan Kahneman, nous vous proposons ces quelques liens :

– le livre (en français) de Daniel Kahneman, Système 1 – Système 2
– la vidéo d’une intervention de Dan Kahneman (en anglais) : voir ci-dessous
– une excellente interview de Daniel Kahneman, réalisée par Philosophie Magazine, et qui a le double mérite d’être assez complète et en français,
– les articles de François Abiven et Richard Bordenave, tous deux hommes d’études, fins connaisseurs et prosélytes des travaux de Daniel Kahneman et Dan Ariely


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