JNE : une édition 2020 sous le signe de la redécouverte du consommateur – Interview de Christine Antoine-Simonet (McDonald’s)

27 Jan. 2020

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Redécouvrir le consommateur… Voilà une invitation qui peut sembler bien paradoxale, à l’heure où les entreprises croulent sous les données, et où les consommateurs ont le sentiment que les marques en savent plutôt trop que pas assez les concernant !
C’est pourtant ce thème qui sera à l’affiche de la toute prochaine Journée Nationale des Etudes, qui se déroulera le 4 février, à l’initiative de l’Adetem et de l’UDM. Une session où il sera fortement question du consommateur d’aujourd’hui et de demain, avec l’enjeu des solutions à inventer ou à combiner pour mieux l’appréhender. Mais aussi de la marque et du sens. Christine Antoine-Simonet, directrice Insights & Strategy de McDonald’s Global, nous livre le pourquoi de ces choix et les grandes lignes du programme.

MRNews : La journée Nationale des Etudes fait partie des évènements incontournables pour les acteurs des études et de la recherche marketing. Pour la 3ème année, vous êtes membre du comité de programme, qui compte une dizaine de professionnels. Qu’est-ce qui vous marque le plus dans l’état d’esprit de cette manifestation ? 

Christine Antoine-Simonet (McDonald’s Global) : Deux mots me viennent spontanément à l’esprit : ‘Inspiration’ et ‘Echanges’. Peu importe la dénomination exacte du poste, lorsqu’on est en charge des études ou du customer insight chez l’annonceur, on se retrouve parfois un peu seul face à une problématique. C’est donc une réelle chance que de pouvoir s’inspirer de ce qui se fait ailleurs, dans d’autres entreprises ou via de nouvelles approches proposées par des agences, autour de cas concrets. S’ouvrir sur ce qui se fait dans des secteurs d’activité différents des nôtres constitue également un vrai plus. Cela a pesé dans nos choix cette année, avec le souci de s’intéresser à des domaines comme la banque-assurance, les services plus généralement, le BtoB, et ne pas s’enfermer uniquement dans le périmètre du FMCG. La notion d’échange est également très présente, sous un mode formel ou informel, y compris pendant les pauses ou au déjeuner. Tout cela est dans l’air du temps, il faut être curieux !

Le thème à l’honneur cette année est celui de la « redécouverte du consommateur ». Ce choix s’est-il fait facilement ?

Absolument, il s’est imposé un peu comme une évidence. Nous sommes nombreux aujourd’hui à vivre la même expérience. Dans toutes les entreprises ou presque, on ne cesse de parler de la data et de son analyse, de la nécessité de travailler sur des modèles de retour sur investissement. Il est indéniable que les données nous aident à mieux connaitre nos clients et leur apporter des offres personnalisées. Mais cela s’inscrit quasi systématiquement dans des perspectives à court terme. Et, du coup, les entreprises investissent moins que par le passé dans des études très fondamentales, en étant ainsi de plus en plus superficielles dans la vision d’un consommateur qui n’a pourtant jamais été aussi complexe.

Redécouvrir le consommateur, c’est d’abord ça, appréhender ses multiples facettes ? 

Tout à fait. Un consommateur dont les motivations varient selon les contextes, mais qui est aussi un citoyen, un influenceur, une personne avant tout ! Mais, en termes de finalité, c’est aussi se redonner des chances de construire à long terme, et d’aider les marques à se différencier, ce qu’elles ont de plus en plus de mal à faire. Celles-ci se focalisent beaucoup sur les composantes rationnelles et transactionnelles, au détriment des dimensions émotionnelles qui sont pourtant fondamentales pour créer et nourrir une relation forte avec les consommateurs. Entendons-nous, l’Intelligence artificielle est un outil formidable, et le retour sur investissement des actions est bien sûr un impératif ; mais je crois qu’il y a une vraie impasse à s’arcbouter sur des enjeux de croissance à court terme. Je force le trait certes, mais dans les entreprises aujourd’hui, on parle beaucoup de la data, et trop peu du consommateur. Et être consumer centric (ou people centric) veut dire connaitre le conso sous tous ses aspects (non seulement le conso-client-acheteur, mais aussi le citoyen, le salarié, le parent, etc……) et intégrer cet individu dans nos développements : écouter, observer, sentir, ressentir, …La data est un moyen, non une fin en soi.

Pour de très nombreuses personnes, les entreprises en savent beaucoup sur le consommateur ; de leur point de vue, elles en savent même trop ! N’est-ce pas paradoxal de vouloir redécouvrir celui-ci ? 

Je pense que c’est une question d’angle… Les entreprises ont aujourd’hui beaucoup de données, et le challenge est de les connecter, de les analyser et leur donner du sens. Il me semble qu’il y aujourd’hui trop de confusion sur la notion d’insight dont la définition et l’usage ont été galvaudés. Les données ne constituent pas des insights, l’identification de ceux-ci réclamant un travail collaboratif de développement et d’articulation. La rigueur propre à l’univers des sciences est utile, mais c’est aussi un « art » que de trouver les bons insights ! La data ne peut se suffire à elle-même, il faut lui associer des compétences d’analyse et d’interprétation. Et c’est notre mission, la raison d’être de notre métier ! Donc non, on n’en sait jamais trop sur le consommateur, sur ses besoins, et sur ce que les marques doivent faire pour créer une relation solide avec eux.

Cette redécouverte du consommateur est indissociable d’une réflexion sur la marque ? 

Oui, absolument. La marque, c’est la valeur ! C’est ce qui s’inscrit dans le long terme. Il est primordial de comprendre la marque dans le contexte actuel pour qu’elle reste pertinente avec son époque, avec la culture. La marque doit générer des émotions afin de créer une relation forte. Et dans un contexte d’obsession du court terme, on peut être tenter d’allouer moins de ressources à la construction de celle-ci (« brand building ») pour donner plus à la vente immédiate (« sales activation »). Il faut définir le bon équilibre. In fine, notre mission est d’aider les marques à rester pertinentes et croître, en apportant une compréhension fine du consommateur et de … vrais insights !

Re-découvrir, c’est aussi aller vers de nouveaux outils d’études ? 

Certainement. Aujourd’hui nous avons une chance inouïe de disposer d’une énorme palette de solutions, et d’exploiter des outils formidables comme l’écoute et l’analyse de ce qui se dit sur les réseaux sociaux par exemple. Mais pourquoi se priver des focus group ou des entretiens individuels ? On n’est pas dans un mode « annule et remplace », « ancien versus nouveau », mais plutôt dans l’hybridation. C’est le principe de l’alliage, de la combinaison, qui permet d’avoir la bonne approche au bon moment. La JNE sera l’occasion d’en découvrir de belles illustrations.

Venons-en plus précisément au programme : comment traduira-t-il cette invitation à redécouvrir le consommateur ? 

Un des partis-pris forts de la JNE est de permettre aux professionnels de découvrir des cas, présentés par des binômes annonceurs – agences. Il s’appliquera naturellement cette année, et même en mode « amplifié » puisqu’il y aura huit cas au menu de la matinée. Avec une première série de quatre présentations sur le thème de « Comment garder une connaissance éclairée d’un individu multi facettes et changeant ? », la seconde étant elle consacrée à la question de « Que gagne-t-on à avoir une vision plus holistique du consommateur ? ».


Découvrir le programme complet de la journée nationale des Etudes


La sélection a été réellement difficile, et nous avons tenu à ce qu’elle représente une large variété de secteurs d’activité et rende compte des changements culturels que connaissent certains d’entre eux. Le format des présentations est conçu pour être aussi inspirant que possible avec, systématiquement, un rappel de la problématique de l’annonceur, un exposé de l’approche et de la raison pour laquelle nous l’avons choisie ; et enfin une rapide évocation des décisions ou des actions mises en oeuvre à l’issue du projet.

Le paradoxe de la donnée dont nous avons parlé sera précisément l’objet de l’intervention de Joaquim Bretcha, le président d’Esomar, en préambule de la journée.

Comment sera adressé l’enjeu de la marque que vous évoquiez précédemment ? 

Il sera très présent en fil rouge. Pour ne prendre que deux exemples, ce sera le cas avec Danone, avec la compréhension des attentes des jeunes par rapport à la nutrition. Ou bien avec l’exemple Le Bon Coin, qui interroge l’importance grandissante des achats de seconde main. Il sera beaucoup question au global de la montée en puissance de l’éco-responsabilité dans les attentes des consommateurs. Et dans ce contexte, les marques qui s’en sortiront seront celles qui auront une raison d’être!

Et pour l’après-midi ? 

Nous serons sur le format des tables rondes. D’abord sur l’enjeu de rendre l’information plus intelligible, ce qui est très connecté à la problématique que nous avons évoquée : comment trouver du sens à partir des données ? Et ensuite sur le thème de comment être plus prédictif sur le consommateur de demain, qui n’est certainement pas la question la plus simple à traiter, avec ces phénomènes à la fois totalement imprévus et porteurs de grands bouleversements, tels que les « Gilets Jaunes » en France ou les incendies en Australie !

Voyez-vous un dernier point à ajouter ? 

Oui, j’en profite pour évoquer un point pratique. L’évènement se déroulera cette année au siège du groupe La Poste, à Paris dans le 15ème arrondissement. Au plaisir de se rencontrer pour échanger et s’inspirer…


 POUR ACTION  

• Echanger avec les interviewés : @ Christine Antoine-Simonet

• S’inscrire à l’évènement : Journée Nationale des Etudes – 2020

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