« L’humain est la clé de notre métier et le restera ! » – Le micro-portrait de Sophie Le Fur (Française des Jeux)

13 Jan. 2020

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Choisir une voie professionnelle, c’est composer avec les circonstances de la vie et une certaine part de hasard, ou de sérendipité diraient certains. Mais c’est aussi parfois accepter une forme d’évidence, reconnaitre une correspondance profonde entre une fonction et sa propre personnalité.
C’est à l’évidence le cheminement qui s’est imposé pour Sophie Le Fur, responsable de l’Expérience et de la Connaissance Client, qui répond aux questions de MRNews dans le cadre de nos « micro-portraits ».

MRNews : Vous travaillez aujourd’hui dans une entreprise dont on parle beaucoup — privatisation oblige —, la Française des Jeux. Quelle est plus précisément votre fonction ?

Sophie Le Fur : Je suis responsable de l’expérience et de la connaissance client, mon périmètre recouvrant en réalité trois équipes distinctes, soit onze personnes au global. Les études, au sens classique du terme, en font naturellement partie. Mais s’y ajoute la Voix du Client, qui a pour mission de collecter tout ce que disent nos clients de manière « non orchestrée » — que ce soit sur les réseaux sociaux, auprès du Service Clients ou en distribution — ces matériaux extrêmement riches étant aspirés et traités via un outil d’analyse sémantique pour en dégager des alertes ou des insights, qui sont ensuite partagés dans l’entreprise. Mon périmètre inclut enfin l’équipe de Développement CX , dotée d’un studio, qui accompagne les métiers pour designer des offres et des services en s’appuyant sur les parcours et les besoins de nos clients, ce sont des méthodes inspirées du du design-thinking.

Nous sommes rattachés à la Direction Clients, une entité transverse dont la vocation est d’ apporter la connaissance clients et les ressources/moyens associés nécessaires au développement de l’activité des différentes Business Units et à la conception de l’expérience clients

Vous ne dépendez donc pas de la direction du marketing ?

Non, en effet. Le marketing est représenté au sein des Business Units. C’est un parti-pris important de l’entreprise, qui a mis en place des entités très autonomes avec ces Bus et une Direction Clients, ce qui apporte à la fois une forte coloration opérationnelle et de l’autonomie à notre activité.

Quelle est votre formation ? Et par quel cheminement en êtes-vous arrivée à faire des études marketing votre métier ?

Mon parcours est universitaire, avec une formation en Sciences Economiques et un 3ème cycle en Affaires Internationales. J’ai découvert le monde des études dans le cadre d’un stage chez Globecast, qui était à l’époque l’opérateur satellitaire de France Télécom. Avec un périmètre différent de celui des instituts, plus proche de celui du conseil, mais qui m’a néanmoins permis de prendre conscience de mon affinité naturelle avec les études

Ce stage a déclenché une sorte de déclic ?

Sans doute. C’est avec cette expérience que j’ai ressenti l’adéquation entre ce métier et ma personnalité. Ce sont des fonctions qui demandent d’être à l’écoute et tourné vers les autres, curieux d’eux, et aussi de se baser sur des faits… J’avais vraiment le sentiment que c’était fait pour moi.

Dès lors, j’ai réalisé jusqu’ici l’ensemble de mon parcours professionnel dans cet univers. En démarrant chez Novatris – avant que cette société ne devienne Harris Interactive -, au sein du département Média et Interactif. Au bout de quatre ans, j’ai rejoint BVA, et ce, à un moment assez particulier avec l’intégration d’In Vivo. Je considère que cela a été une chance. Cela m’a permis de faire des études passionnantes et assez différentes de ce qui se faisait par ailleurs, avec l’inspiration associée aux principes de l’économie comportementale, et un renouvellement constant des méthodes. J’y suis resté 7 ans. Et ensuite j’ai rejoint la FDJ — il y a donc maintenant 4 ans — d’abord en tant que chargée d’études, puis responsable des études, pour devenir ensuite responsable de la connaissance et de l’expérience client.

Passer de l’institut à l’annonceur est souvent perçu comme un grand chamboulement. Était-ce le fait d’un concours de circonstances, ou bien un choix délibéré ? Comment l’avez-vous vécu ?

Je me sentais bien chez BVA. Mais l’idée d’aller voir ce qui se passait côté annonceur me titillait après onze ans en institut… Je ressentais une envie de plus en plus forte de travailler différemment, avec une autre perspective. Lorsqu’on est en institut, on est au contact de clients qui ne partagent que partiellement les éléments de contexte, les enjeux clés qui sont les leurs, les autres sources de données et aussi la façon dont les études se traduisent en décisions ou en actions. Le travail peut ainsi parfois perdre un peu en richesse. J’ai eu le sentiment qu’en intégrant le service études d’un annonceur, je pourrais bénéficier d’une vision « enrichie » et donner une dimension plus opérationnelle à mon métier. Ma curiosité m’a donc incitée à regarder dans cette direction, et la piste FDJ s’est présentée au bon moment. FDJ faisait partie de mes « entreprises cibles » car j’avais été prestataire pour cette entreprise, et avait pu constater qu’elle valorisait fortement l’innovation, le client et donc la fonction études. Et puis l’idée de travailler dans une entreprise qui associe divertissement et utilité sociétale me plaisait ! Tout cela a fait que le choix s’est imposé comme une évidence.

Jusqu’ici, qu’est-ce qui vous a apporté le plus de plaisir dans cette fonction ?

Au-delà du constant renouvellement de nos métiers, c’est certainement l’importance de la composante humaine. On travaille avec et au service d’autres personnes, tout en étant à l’écoute des clients… En réalité, on est en permanence connecté aux autres. C’est une fonction qui amène à faire beaucoup de rencontres enrichissantes.

Après 15 ans, cela reste mon quotidien et mon moteur : mes équipes, mes clients internes, les clients de FDJ, mes pairs au travers d’Insight Hub…

Parmi ces rencontres, lesquelles vous ont le plus marquée ?

C’est une question difficile, parce que je vais forcément oublier des personnes qui ont joué un rôle important… Spontanément, je pense par exemple à Patrick Van Bloeme et Nathalie Perrio-Combeaux, chez Harris Interactive qui m’ont offert mon 1erjob. Ou à Jean-Faustin Betayene qui a été mon premier responsable et auprès de qui j’ai beaucoup appris notamment sur les problématiques digitales. Chez BVA, Eric Singler, Alain Sivan, Richard Bordenave, Etienne Bressoud, Olivier Blanchet ou encore Patrick Pinard sont des personnes au contact desquelles on s’enrichit énormément. J’estime au global avoir eu beaucoup de chances de faire toutes ces rencontres !

Si vous n’étiez pas dans le domaine des études, quel autre métier feriez-vous ?

Ah, voilà encore une question épineuse… Dans le cadre d’une mission sur la trithérapie, j’ai eu l’occasion d’être en contact avec des médecins de l’AP-HP qui travaillaient sur les maladies infectieuses. Au-delà de l’admiration que j’avais pour eux,  je me suis dit que j’aurais aimé être médecin, avec — c’est la représentation que j’en ai en tout cas — la nécessité d’une approche très rigoureuse et en même temps très humaine, très à l’écoute. Je ne sais pas si j’en aurais été capable, mais oui, je crois que c’est un métier qui m’aurait plu.

Quels conseils donneriez-vous à un junior qui aurait des velléités à se lancer dans ce métier ?

Je lui dirais de foncer. J’adore ce métier. Même s’il peut être challengé aujourd’hui, il est passionnant. La première chose à faire bien sûr est de s’assurer que cela correspond bien à sa personnalité. La posture des études n’est pas toujours évidente … On formule des conseils, des recommandations, mais on n’est pas le décideur final, y compris lorsqu’on travaille côté annonceur. C’est dans la nature même du conseiller, qui est suivi ou pas. Il ne définit pas la stratégie, son rôle est d’éclairer la prise de décision avec intelligence et le plus de prédictivité possible.

Je lui dirais également de bien choisir les entreprises au sein desquelles il va tracer son chemin. Je considère que j’ai eu beaucoup de chances d’intégrer des sociétés qui, chacune à leur façon, faisaient bouger les lignes : Harris Interactive pionnier des études en ligne, IN VIVO BVA qui a bousculé les études PGC avec des approches comportementales  

Et, côté annonceur, c’est important d’évoluer dans une entreprise où a fonction études est valorisée et indépendante, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. 

Une dernière question enfin : si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous dans l’univers des études marketing ?

Je crois que je ferais en sorte que les journées durent 24 heures de plus ! Nous sommes en permanence engagés dans une course contre la montre, et l’on manque toujours de temps, pour faire plus de choses, gérer plus de projets encore, mais aussi et surtout pour pouvoir prendre un peu de hauteur, apporter plus de transversalité, et donc une plus grande valeur ajoutée. Il y a bien sûr un côté valorisant à faire une étude dans des délais très courts, c’est un challenge de faire vite et bien. Mais il faudrait parfois un peu de slow, la valeur des études se joue quand même beaucoup sur ce paramètre du temps. L’Intelligence Artificielle nous aidera sans doute, en nous permettant de nous délester de certaines tâches et donner la priorité à l’intelligence humaine qui restera la clé ! 


 POUR ACTION  

• Echanger avec les interviewés : @ Sophie Le Fur

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