#2 Le saviez-vous ? – Comment interroger les enfants ?

6 Sep. 2019

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A l’heure de la rentrée scolaire, la nouvelle rubrique « Le saviez-vous ? » aborde les conditions d’enquête auprès des enfants et des adolescents, et notamment la question des règles qui doivent impérativement être respectées selon les pays.
Philippe Guilbert, expert Etudes auprès des organisations professionnelles (SYNTEC Conseil, ESOMAR), nous résume l’essentiel et nous communique les liens de référence pour aller plus loin.

L’explication de Philippe Guilbert

Les mineurs n’ont pas le droit de vote et ne sont habituellement pas interrogés dans les études politiques. Ils sont cependant dès aujourd’hui les acheteurs, influenceurs ou utilisateurs de nombreux produits et constitueront demain la principale cible à conquérir. Il est donc essentiel de connaître leurs comportements et opinions, en respectant les contraintes spécifiques de collecte et protection de données.

Un mineur est juridiquement une personne qui n’a pas atteint l’âge légal de la majorité. On distingue généralement les enfants, dont l’interrogation nécessite l’autorisation préalable des parents, tuteurs ou adultes responsable, des autres mineurs, parfois appelés jeunes («young people» en anglais), qui peuvent donner leur consentement éclairé à participer à une enquête. Si la plupart des pays ont adopté des lois pour protéger les enfants ou mineurs, les définitions et seuils d’âge varient considérablement. 

L’entrée en vigueur du RGPD n’a pas harmonisé les définitions européennes puisque l’article 8 du RGPD prévoit que le consentement de l’adulte responsable est nécessaire en dessous de 16 ans, mais que les Etats membres peuvent baisser ce seuil jusqu’à 13 ans. L’âge à partir duquel un mineur peut être interrogé sans autorisation parentale varie donc entre 13 et 16 ans… Ainsi, l’âge de la majorité numérique a été fixé à 15 ans en France(cf article 45 de la Loi Informatique & Libertés modifiée par ordonnance du 12 décembre 2018).

A noter qu’aux Etats-Unis, le COPPA (Children’s Online Privacy Protection Act) a défini un seuil fédéral de 13 ans : Google vient d’écoper d’une amende de 170 millions de pour ne pas avoir respecté le COPPA et enregistré des données Youtube d’enfants sans le consentement des parents. Mais les Etats peuvent aussi adopter des lois de protection des enfants qui restreignent également les possibilités de contact et d’enregistrement de données personnelles des mineurs. Le guide international ESOMAR GRBN dédié aux enfants, jeunes et personnes vulnérables indique qu’en l’absence de définition nationale, les professionnels des études et analytiques doivent retenir également le seuil de 13 ans : autorisation parentale préalable pour les enfants de 12 ans et moins, pas d’autorisation parentale pour les jeunes 13-17 ans. Ces différences par pays, voire même à l’intérieur d’un pays, conduisent des enquêtes internationales à cibler seulement les 18 ans et plus.

Quel que soit le seuil d’âge, les principes de précaution et d’absence de préjudice doivent être strictement appliqués pour les mineurs (enfants et jeunes), que cela concerne des produits interdits (en dessous d’un âge ou pour tous), des produits à tester comportant des risques pour la santé, des images/vidéos/formulations pouvant choquer, des comportements à risque, des données sensibles… 

Au total, les enquêtes auprès de mineurs doivent être préparées avec la plus grande précaution. Il faut notamment :

  • Ne jamais aborder en face-à-face une personne seule qui est visiblement un enfant.
  • Vérifier l’âge de l’interviewé en début de questionnaire (face-à-face, téléphone, internet…).
  • Demander l’accord du parent ou adulte responsable avant celui de l’enfant.
  • Contrôler que le sujet abordé, les questions et le matériel ne posent pas de problème juridique ou médical, et ne peuvent occasionner de préjudice pour les mineurs interrogés.
  • Adapter les questions et formulations aux enfants si besoin (visuels, icônes…).
  • Vérifier qu’aucun document photo, vidéo et audio et qu’aucun verbatim ne permette d’identifier un enfant (anonymisation si nécessaire).

L’essentiel en 1 page du guide ESOMAR GRBN : https://www.esomar.org/uploads/private/professional-standards/ESOMAR-GRBN_Cheatsheet_Children-Young-People-and-Other-Vulnerable-Individuals.pdf

Le guide ESOMAR GRBN sur les enfants, jeunes et personnes vulnérables : https://www.esomar.org/uploads/public/knowledge-and-standards/codes-and-guidelines/ESOMAR-GRBN_Guideline-on-Research-and-Data-Analytics-with-Children-Young-People-and-Other-Vulnerable-Individuals_2018.pdf


 POUR ACTION 

• Echanger avec l’auteur : @ Philippe Guilbert

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