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Ce que les archétypes de Jung peuvent apporter aux marques – Interview de Michel Montrosset, auteur de Marketypes

28 Mai. 2015

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Et si un détour par les travaux de Jung et ses fameux archétypes pouvait apporter une réelle plus-value dans la réflexion sur les marques, tant pour prendre pleine conscience de leur statut et de leur rôle dans notre société que pour les aider à mieux se différencier ? C’est le fil conducteur qu’ont suivi Michel Montrosset et Thibaut Ferrali, tous deux planners stratégiques et co-auteurs de l’ouvrage Marketypes qui vient d’être publié par les Editions François Bourin. Michel Montrosset répond aux questions de MRnews.

MRNews : En tandem avec Thibaut Ferrali, vous venez de publier Marketypes, un ouvrage à destination des acteurs du marketing et de la communication. Cet ouvrage est sous-titré « Les archétypes de Jung au service des marques ». Pourquoi ce détour par les travaux de Jung ?

Michel Montrosset : Nous sommes partis d’un chiffre assez étonnant, mais qui a conforté et traduit les impressions que nous avions depuis quelques temps à propos de la place des marques dans la société. 65% des Français considèrent les marques comme une des seules entités capables de prendre en charge un changement de société. De ce point de vue là, elles devancent largement les politiques et les institutions, mais aussi les artistes ou les intellectuels, les scientifiques. Volontairement ou pas, les marques ont fini par remplacer les représentations collectives traditionnelles, nos modèles de construction, de comportement et d’attitudes qui structurent nos vies. A partir de là, et en l’absence d’outil renseigné, il nous a semblé important de dresser une cartographie de ces modèles, d’en proposer une grille de lecture et de compréhension. Et pour cela, quoi de plus approprié que les travaux de Jung sur les archétypes (puisque c’est bien d’archétypes qu’il s’agit) et surtout quoi de plus robuste que l’approche des types, développée scientifiquement par Myers et Briggs à travers le MBTI, l’indicateur de personnalité le plus utilisé au monde aujourd’hui ? C’est ce que nous avons adapté aux marques et à leurs relations aux consommateurs.

D’autres auteurs se sont précédemment intéressés à cette application des archétypes à l’usage des marques et de leur storytelling. Quel est le point d’originalité que vous avez visé avec Marketypes ?

Il nous semble qu’il y a quelques différences importantes. Nous avons notamment adopté le parti-pris d’être exhaustif, de ne pas choisir tel ou tel type parmi les seize définis par le MBTI pour disposer d’une cartographie à plat, universelle et opérante. Mais celle que nous revendiquons plus particulièrement, c’est le fait que notre approche des types est 100% dynamique et relationnelle. Typer une cible ? Catégoriser une marque ? Chouette ! Mais pour en faire quoi ? On définit une tendance type de marque et une tendance type de consommateur… essentiellement pour leur trouver des caractéristiques de points de rencontre. L’essence du marketing et de la communication, c’est de mettre en relation, de se faire rencontrer et s’aimer le plus longtemps et intensément possible une marque, ses produits et des consommateurs à partir de leurs besoins, leurs attentes, leurs désirs, leurs rêves, etc. Se concentrer sur la compréhension de cet engagement, sur la nature profonde, essentielle et archétypale de cette relation idéale, fantasmée, réelle, virtuelle, concrète, quotidienne fait aller plus vite, plus juste et plus simplement aux solutions.

Vous nous proposez donc une galerie de 16 « Marketypes », répartis en 4 grandes familles. Prenons déjà ces dernières : qu’est ce qui les différencient fondamentalement les unes des autres ?

Chaque grande famille remplit une fonction individuelle et sociale, à des degrés différents. Les Faiseurs agissent et font, ce sont les types les plus physiques et incarnés. Les Gardiens consolident et reproduisent, ce sont les plus instinctifs et les plus intégrés. Les Explorateurs ouvrent des voies et inventent, ce sont les plus culturels et ouverts. Les Guides montrent le chemin et éduquent, ce sont les types les plus intellectuels et collectifs. Nous avons donc affaire à quatre énergies complémentaires, de la plus physique à la plus intellectuelle, sans aucune hiérarchie ou jugement de valeur, quatre façons d’être sans lesquelles personne, individu ou société, ne pourrait totalement exister.

Et ensuite, à l’intérieur d’une famille donnée, est-ce que ce sont nécessairement les mêmes axes qui permettent d’appréhender l’originalité propre à chacun des types ?

Chaque famille héberge quatre types que l’on va définir en fonction des préférences d’une part en matière d’orientation (introversion ou extraversion) et d’autre part en matière de jugement (objectif ou subjectif). Par exemple, au sein des Gardiens, on trouve deux types extravertis dont l’un est porté vers le partage avec les autres, le Supporter, et l’autre sur la réalisation des choses, le Manager. On retrouve ainsi à chaque fois des traits d’humanité qui permettent de mieux isoler la personnalité de la marque et des consommateurs.

L’un de vos partis-pris d’écriture a consisté à illustrer la présentation des types avec de nombreux cas, en évoquant ainsi les marques les plus emblématiques de chacun d’eux. Il est naturellement difficile de résister à la tentation de vous demander quel marketype se cache derrière la marque Samsung, qui est celle pour laquelle vous travaillez aujourd’hui…

La question de Samsung nous semble intéressante à deux titres. Lorsqu’on regarde la marque sous l’angle de son cœur d’identité, de son essence, elle est un excellent exemple de ce qu’est une marque Manager, offrant le support et la productivité de ses produits et aidant dans la réalisation des projets (cf. la campagne de marque « Launching People ») et in fine donnant accès au plus grand nombre à de nouvelles possibilités de vie. Mais lorsqu’on prend de la distance dans le temps et dans l’espace, on se rend compte qu’elle est aussi une Megabrand, un géant généraliste, qui a besoin par moments d’un peu plus d’espace en communication : elle peut donc s’autoriser des prises de parole basées sur d’autres types avec des structures d’engagements différentes, comme des campagnes produits très Epicurien ou des actions purement Novateur. D’où l’intérêt de cette approche relationnelle et dissociée.

On peut penser que cet ouvrage intéresse prioritairement les brand managers et les spécialistes de la communication. Mais il peut aussi nourrir la réflexion des spécialistes des études, en proposant un regard différent sur les marques. Outre le fait de le lire bien sûr, auriez-vous un conseil à leur proposer quant à la meilleure façon de s’approprier le contenu de ce livre ?

Marketypes n’est surtout pas un pré-carré pour une profession donnée. Nous l’avons conçu en pensant à ceux qui ont pris l’habitude de travailler sans outil particulier. Il peut être utilisé par les marketeurs, les professionnels des études, de la communication… même par un passionné. Pourquoi ? Parce qu’à notre connaissance, il n’y a pas d’outil capable de répondre à des besoins aussi larges, allant de la simple recherche d’idées à l’établissement d’une plateforme de marque, en passant par la compréhension d’un insight. Nous avons tenu aussi à ce qu’il présente un double visage, qu’il soit à la fois sensible, ludique, participatif mais aussi rationnel, sérieux et introspectif. Marketypes peut s’utiliser en fil rouge, quelques minutes pour structurer sa pensée, ou de manière suivie sur un gros projet de positionnement : tout dépend du contexte et de la personne qui l’utilise.


 POUR ACTION 

• Echanger avec les interviewés : @ Michel Montrosset

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